jeudi 30 mai 2013

1. Fin

Fin.

C’est étrange de partir. Je crois que je ne l’ai toujours pas réalisé. Je vais quitter Stoneham que j’ai aimé, Stoneham que j’ai haï pour la suite. Je ne connais pas grand-chose de l’extérieur, j’ai passé mes premières années en ville, il n’en reste que quelques brumes éparses qui ne sont que les échos de photographies et d’histoires que mes parents ont peut-être inventées de toutes pièces. Ensuite, ce fut la campagne profonde et les livres. Surtout les livres. Harry Potter, à peine un an après sa parution française, m’a fait sombrer dans un univers où je m’échappais tant que je le pouvais et bien d'autres sont devenus autant d'exil. Encore aujourd’hui, je m’échappe par la lecture, le cinéma, la musique et les jeux vidéo. Dans deux jours, je m’échappe de Stoneham et si je reviens, ce sera quelques jours, mais y vivre? Je ne crois pas.

Le paysage est magnifique, défiguré par les fils électriques et la banlieue qui s’y est établie pour sabrer la forêt. Les montagnes que mon père appelle collines semblent endormies et même la spectaculaire vallée de la Jacques-Cartier m'apparaît fluide et douce, comme si le vent jouait au piano dans les feuilles du parc.

De manière plus concrète, j’ai une famille, une maison et je ne manque de rien. Des amis à gauche et à droite, et des gens que je n’ai pas forcément envie de croiser aussi loin que porte mon regard.

J’ai aussi une grande bibliothèque.

Mais mon esprit embrumé par le manque de sport et de stimulation ne met pas l’accent sur le doux paysage, ma famille que j’adore et ma bibliothèque qui va me manquer, car je vis depuis quelques semaines le moment où je me lancerai dans le vide. D’un côté, j’ai peu profité de ma dernière semaine chez moi, mais j’ai fait en sorte de pouvoir partir sans regarder derrière moi. En fait je dis ça, mais si quelqu’un pleure mon départ, on peut être assuré que je fonds aussi en larmes.

C’est aussi ça l’aventure.

Je pars en quête d’une vie culturelle impossible ici, d’une synergie qui avant me répugnait et surtout du mouvement. Autrement dit, je me cherche ailleurs, je pars confronter des limites que je ne connais pas encore, la faute à la campagne.

Alea jacta est.
(Le sort en est jeté)

Odin


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